Un café
Et comment ne pas mentionner ici un autre incident où il est question de café dans un film populaire, cette fois dans la comédie ouvrière britannique Les Virtuoses? Le héros raccompagne chez elle une jolie jeune femme qui, en arrivant dans son appartement, lui dit: « Vous entrez prendre un café?» Il répond: « Il y a un problème, je ne bois pas de café », à quoi elle riposte avec sourire: « Ce n’est pas un problème, je n’en ai pas.»
L’immense force érotique de sa réplique réside dans la façon dont, par une double négation, encore une fois, elle prononce une invitation sexuelle si directe qu’elle en est embarrassante, mais sans jamais parler de sexe. Lorsqu’elle invite l’homme à boire un café puis avoue qu’elle n’a pas de café, elle n’annule pas l’invitation, elle rend simplement bien clair que sa première proposition n’était qu’une invitation de substitution (ou un prétexte), indifférente en soi, pour l’invitation sexuelle.
Sur le même principe, on peut imaginer un dialogue entre les États-Unis et l’Europe fin 2002, alors que l’invasion de l’Irak se préparait. Les États-Unis disent à l’Europe: « Vous vous joignez à nous pour attaquer l’Irak afin de trouver les armes de destruction massive ? »; l’Europe répond: « Mais nous n’avons pas l’équipement nécessaire pour rechercher les armes en question! »
Réponse de Rumsfeld: « Pas de problème » il n’y a pas d’armes de destruction massive en Irak. »
Mes blques, ma philosophie.
Slavoj Zizek.
PUF, 2014.